Fabrication dune moulure au Stanley 55

Je décide donc d'aiguiser un fer complexe, le 106, (qui est une doucine grecque d'après le livret d'instructions) et de l'installer sur le rabot. Sur les 54 fers que j'ai, seul trois ont été aiguisés. J'aplanis la planche du fer à la pierre 1000 et je polis à la 5000.

Le biseau est curieusement fixé à 40° par la compagnie. J'essaie cet angle: pierre 1000 et 4000. Le profil de ce fer m'oblige à utiliser de petites pierres pour les outils de sculpture (slip stones). J'aiguise donc au minimum même si j'eus préféré me rendre à la 8000 mais je n'ai pas cette pierre. Il va falloir que je m'en fasse une.

Quinze minutes plus tard, le fer est prêt à être installé.

Je choisis une petite planche de pin de 18", je règle le fer, les patins, les guides de profondeur et j'installe le guide latéral: 20 minutes en tout et pour tout. Sur la photo suivante, on voit le fer appuyé sur les deux patins arrière et les trois patins de devant.

Voici maintenant une vue du dessous où on voit les patins, le fer, les deux guides de profondeur et le guide latéral en place.

Je fais un petit essai et je sors un peu le fer. Pour me faciliter les choses, je décide de ne pas faire la moulure directement sur le bord de la planche mais de laisser une languette à l'extérieur pour faciliter un peu le guidage. Il faut dire que je suis débutant dans le domaine. De plus, je suis gaucher et mon rabot lui, est conçu pour les droitiers, alors je préfère ne pas trop prendre de chances.

Comme recommandé, je commence à raboter par l'aval en reculant à chaque coup vers l'amont. Joie comme dirait Achille Talon, ça tout l'air à marcher!

La photo suivante montre un gros plan de la chose à son début. On ne voit que la languette à l'état d'ébauche, le lacet et le début de la doucine.

Sur la photo suivante, on voit un état un peu plus avancé de la moulure. L'affaire se corse et prend forme.

Sur la photo qui suit, on peut se rendre compte de la quantité de bois qu'il faut enlever. Une orgie de planures. Ici on approche du stade final. Notez la planure complète qui sort du fer et le recouvre. C'est comme si on y était. Notez aussi le guide de profondeur qui fait son office en arrêtant un affouillement par trop intempestif.

Maintenant, il faut faire disparaître la languette qui ne servait que de guide. Ici, j'utilise le rabot japonais mais en rétrospective, je pense que j'aurais pu utiliser le couteau à fendre (slitter) qui vient avec le 55 et se monte à la place du guide de profondeur arrière. Ç'eut été plus rapide. En tout état de cause, il ne s'agit pas ici de donner dans la planure mince car on n'en finirait jamais s'il fallait fendre les atomes en quatre. Alors, on donne dans l'épais, ce qui n'est pas désagréable non plus.

Pour terminer de dégager le lacet, j'utilise ici le rabot à épauler. Une autre merveille en action. J'approche du but et je ne me peux plus.

Un vieux truc de Sioux que j'ai appris de Roy Underhill: on polit sa moulure avec des planures du même bois en frottant un peu. Ceci donne une belle finition. À bien y penser, c'est aussi un truc de tourneur.

Et voilà le travail!

Je dois dire qu'avant de commencer, j'étais loin d'être certain de réussir aussi bien en si peu de temps. J'ai mis environ vingt minutes à compléter cette moulure, en examinant fréquemment l'avancement du travail et en prenant quelques photos. Une chose est certaine, un droitier aurait eu encore plus de facilité que moi à fabriquer cette moulure. La prochaine fois, je pense pouvoir faire une moulure de 8 pieds dans le même laps de temps.

Le Stanley 55 est impressionnant et peut même sembler d'une complexité extrême. Mais dans le fond, c'est un rabot comme les autres, à la seule différence que tout est ajustable. Ce sont les mêmes principes physiques qui sont en cause. Celui ou celle qui est un peu à l'aise avec les rabots et qui ne se laisse pas impressionner par la débauche de vis et d'ajustements réussira à coup sûr. Tout ce qu'il faut est un ajustement méthodique du rabot et un peu de courage pour plonger.

Même avec le fer le plus complexe, ce qui est le cas ici, les planures sortent facilement. Il faut pousser un peu plus fort vers la fin, lorsque le fer mord de tout son profil. Mais ce n'est pas plus forçant que faire du rabotage de finition. Aussi, il ne faut pousser le rabot que de la main droite, la gauche appuyant le guide latéral sans pousser vers l'avant. Ce n'est qu'un autre réflexe qui se développera avec le temps.

Au début, je craignais devoir refaire certains ajustements en cours d'opération. Pendant tout le travail, les ajustements ont bien tenu même si les vis n'avaient été serrées qu'à la main. Ça donne un bon aperçu de la qualité du machinage du rabot.

En aucun moment je n'ai senti le fer vibrer. Ce fer n'est supporté que par deux minces patins. J'ai été agréablement surpris. Reste à voir comment il se comportera dans du bois plus dur.

C'est vraiment plaisant de retrouver les techniques des anciens. J'encourage les ébénistes qui font des pièces uniques à tenter l'expérience. Il y a des types de moulures qui ne sont réalisables qu'au rabot. J'avais déjà commencé à faire des moulures avec des rabots en creux et en bosses et je pense que les deux types peuvent se compléter admirablement bien pour produire des pièces uniques ou pour faire des répliques ou de la restauration. Étant donné que la documentation traitant de ces techniques est passablement rare, j'espère que vous trouverez cette modeste contribution un peu utile. (Pas si modeste que ça tout de même )

Je remercie PhilB qui m'a donné le goût d'essayer cet outil et qui m'a si bien conseillé pour l'acquisition de ce 55. Je me suis aussi inspiré de son article qui est sur ce site pour l'ajustement du rabot.

Bon bien, écrire, ça donne soif comme vous n'avez pas idée.

- Aubergiste, à boire, palsembleu de ventre saint-gris!

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