Gouge japonaise???

Frank,

Alors là, attention. Dureté et résistance à l'abrasion sont deux propriétés différentes dans le merveilleux univers de l'acier. Dans un même type d'acier, ces propriétés vont de pair mais dans des aciers différents, bien téméraire celui qui l'affirmerait comme tu le fais. Je donnais l'exemple de l'acier A2 cryo de ma L.-N. qui était 2 à 3 fois plus long à aiguiser que ma Shizen japonaise qui est pourtant beaucoup plus dure. Il y a aussi la robustesse (toughness) et la résilience qui sont encore des propriétés qui ont à voir avec l'usage qu'on en fait en ébénisterie. J'y reviendrai si besoin est.

En ce qui concerne les techniques de forge, généralement les outils bas de gamme sont de fabrication industrielle, mécanisée pour l'essentiel des opérations qui sont la plupart du temps peu nombreuses. Pour les outils de milieu de gamme, les opérations mécanisées sont beaucoup moins nombreuses et parfois même inexistantes. Les outils de plus haut de gamme sont faits manuellement.

La forge manuelle n'exclut pas l'usage du pilon. Les plus grands maîtres japonais qui forgent des sabres utilisent le pilon, pour une ou deux opérations sur une centaine, car c'est plus précis (voir Yoshindo Yoshihara dans The Craft of the Japanese Sword). En outre, ça permet de marteler plus rapidement et donc de chauffer le fer moins souvent, ce qui évite les pertes de carbone et améliore donc la qualité. De même, les forgerons taillandiers et autres l'utilisent aussi. De toutes façons, le pilon peut être considéré comme folklorique comme tu dis car il date d'avant la révolution industrielle. C'est un outil primitif.

Il ne faut pas voir les forgerons japonais comme des gens attardés aux coutumes anciennes; ils font de la recherche sur la métallurgie depuis le 12e siècle! Ils sont constamment à la recherche de procédés permettant de donner un outil encore meilleur, encore plus beau. Ce n'est qu'au milieu du 20e siècle que les aciers occidentaux ont réussi à rattrapper les leurs sans toutefois les dépasser. Et ils ont fait ça sans microscopes électroniques ou autres rayons X. Seuls ou avec un ou deux assistants dans une petite forge, ils transforment un acier grossier, plein de scories, en un acier qu'aucune technique industrielle ne permet encore de fabriquer.

Sur le fait que JWW puisse beurrer épais, je demande à voir. On peut semer le doute; l'étape suivante est d'en faire la démonstration. M. Damsen, le proprio de JWW, est cité par Toshio Odate comme un fin connaisseur. Pour moi, c'est l'équivalent de Leonard Lee en fait d'intégrité. Il y a certainement des entreprises qui font de la fausse représentation dans ce domaine comme dans d'autres. De toutes façons, le catalogue de JWW n'est pas ma seule source de documentation. Regarde le livre de L. Lee sur l'aiguisage et tu y verras la description d'une «usine» de ciseaux japonais. Eh bien dans cette «usine», on forge à la main même si on utilise parfois des pilons électriques, oh sacrilège! Si je me rappelle bien, il qualifie cette usine de dickensienne.

Dans la forge à la main, il y a aussi la trempe et le revenu, toutes opérations manuelles.

Moi non plus, je ne crois pas aux panacées. Dans cet échange épistolaire, j'ai fait attention de ne pas présenter les outils japonais comme une panacée et j'ai bien dit que je n'ai pas essayé les gouges à sculpter japonaises, ce qui ne saurait toutefois tarder. Mais connaissant bien les ciseaux d'ébénistes qui sont forgés de la même manière, je me doute un peu de leurs performances.

Un autre beau duel en perspective, mes amis!

Sayonara

Hé hé, moi aussi j'arrête car si je continue, je vais décoller. J'ai édité un peu mon texte précédent.

Eh Basher, je ne suis pas à la moitié de ma puissance, Frank non plus. :wink:

Frank, on devrait aller au Japon ensemble, surtout à Miki. On emmène Gosseux et on fait un détour par la Muraille de Chine.

Frank, on a un lecteur, joie!

Miki, c'est la capitale de la forge au Japon. C'est situé près de Kyoto.
www.mapquest.com/maps/map.adp?searchtype...country=JP&city=miki